Plutôt que de chercher la falsification, il est courant de
chercher plutôt la confirmation. Par exemple en science (Popper) ou vis-à-vis
de n’importe quel jugement.
Il faudrait encore comprendre le contexte et le processus
exact de cette tendance. Par exemple ne vient-elle pas d’un rapport à autrui
mêlé d’autorité ?
Quand on cherche des idées de fiction, en pensant à la
réalité, une tendance semblable paraît se fait jour, qui consiste à ne pas
pouvoir voir la réalité autre qu’elle n’est, ou qu’on pense qu’elle n’est :
l’imagination se fait alors son miroir, et tout argument ou idée vient
confirmer cette réalité, qu’il paraît difficile de soulever, de transformer, de
rayer. Il en résulte ce qui est vécu comme une faiblesse à la faire paraître
autre (il ne s’agit en fait pas de cela).
Le contraire de la confirmation est la contradiction, mais
comme contraire, soit un miroir inversé. L’esprit de contradiction – réflexe
qui ne permet pas lui non plus de décoller son nez du miroir, dont les deux yeux
au-dessus du nez perçoivent ce qu’ils prennent pour la réalité même.
La falsification n’est pas la contradiction, elle emprunte
un autre chemin qui est celui de l’interrogation. Face à une hypothèse
scientifique, confirmée ou en attente d’expérimentation, la falsification
consistera à imaginer une expérience permettant de tester cette hypothèse.
En fiction, la falsification passera par l’imagination d’un
autre scénario, qui paraîtrait, dans l’univers de la fiction, possible. Ce n’est
pas détourner ou transformer des éléments de la réalité, mais les percuter par
des évènements ou des liens imaginés, collision dont naîtra une nouvelle
réalité, une réalité falsifiée, un fake.
Cette collision est une donnée importante de la création, en
particulier la collision entre deux ou plus éléments d’univers différents. Toute
création peut ainsi être appréciée comme un agencement, un bricolage, un
branchement créatif, d’éléments empruntés à des appareils différents. De cet
accident procède un objet nouveau, vecteur de sensations, de perceptions, de
perspectives, d’imaginations nouvelles.
Le fake n'est pas une contradiction lancée à la face de la réalité, il en est sa falsification, une nouvelle image. Affirmé comme tel ou non, exprimé dans un esprit rieur ou sérieux, qu'il paraisse absurde (comme Sarkozy, comme certaine comparution immédiate dont j'ai pu être le témoin) ou crédible, qu'il soit le fait de politiques, de décideurs économiques, d'apprentis journalistes joueurs ou d'écrivains du dimanche, n'est-il pas la voie royale des transformations de la réalité, au-delà de sa seule image et de celles qu'il produit ?